Ioanna Paraskevopoulou et Amit Noy aux Abbesses

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Le Théâtre de la Ville ouvre sa saison 2023-2024 avec un focus sur les jeunes créateurs que nous avions pu voir en juin 2022 dans le cadre du concours Danse Elargie.

Tout au long du mois de septembre, les jeunes artistes en devenir seront visibles dans des formes courtes ou achevées au Théâtre des Abbesses. Les deux premières soirées proposaient les créations de Amit Noy et de Ioanna Paraskevopoulou, deux univers très contrastés.

A Big Big Room Full of Everybody’s Hope de Amit Noy.

Focus jeunes créateurs avec A Big Big Room Full of Everybody's Hope de Amit Noy.
A Big Big Room Full of Everybody’s Hope © avoiretadanser

Amit Noy, jeune chorégraphe néo-zélandais dorénavant installé à Marseille présentait sa première création A Big Big Room Full of Everybody’s Hope. Sur scène on découvre les quatre membres d’une même famille, Amit Noy le chorégraphe, son père, sa mère et sa sœur se tenant serrés comme pour un portrait photographique de famille. Durant ce moment d’immobilité une question est projetée sur le fond de scène interrogeant l’espace entre les corps qui ont vécu ensemble.

La pièce nous décrit en différentes séquences les espaces relationnels qui lient chacun des membres de cette famille dans des interrelations croisées faites d’empathie et d’attention. Entre un moment dansé par Amit Noy sur Stravinsky et les chansons de la sœur, façon comédie musicale, qui évoque ses angoisses face aux hommes et à la nourriture, des inserts vidéo d’entretiens du chorégraphe avec sa grand-mère viennent mettre à jour les cicatrices secrètes de cette famille.

Mais entre ces différentes formes de traitement autobiographique qui alternent tout à tour danse en amateur (les parents), ballet néo-classique (le fils), comédie musicale (la sœur) et témoignage vidéo (la grand-mère), nous nous sommes perdus dans cette très grande chambre remplie de l’espérance de chacun.

Créé et dansé par Amit Noy, Maytal Noy, Liora Noy, Belina Neuberger.

A Big Big Room Full of Everybody’s Hope de Amit Noy vu le 07 septembre 2023 aux Théâtre de la Ville / Les Abbesses.


Coconut Effect de Ioanna Paraskevopoulou.

Focus jeunes créateurs avec  Coconut Effect de Ioanna Paraskevopoulou aux Abbesses.
Coconut Effect © avoiretadanser

Ioanna Paraskevopoulou fut et est encore l’interprète de chorégraphes grecs les plus en vue comme Dimitris Papaioannou et Christos Papadopoulos. Elle remporta en juin 2022 un des quatre prix du concours Danse Elargie avec un extrait de son duo MOS en compagnie de son compatriote Georgios Kotsifakis sous le titre de Coconut Effect. Le duo sonorisait en direct des extraits de films muets ou dont le son avait été retranché, projetés en fond de scène.

Coconut Effect est donc une pièce courte d’une quinzaine de minutes qui en garde le principe mais présentée pour l’occasion avec une dizaine de jeunes interprètes. Lorsque le rideau se lève sur eux, ils sont tous placés devant un micro et ont quelques accessoires posés au sol ou tenus à la main.

Remettre du son

Armés des mêmes objets qu’utilisent les bruiteurs de films, les interprètes vont tour à tour sonoriser un sac plastique qui vole au vent, des courses de chevaux (le fameux effet obtenu avec des noix de coco), la danse serpentine de Loïe Fuller, une scène de baisers, un combat de boxe, une scène en pleine mer, et Fred Astaire dans un duo de claquettes, etc.

On pense au plasticien Christian Marclay bien connu pour son travail sur les images filmiques et le son, à la différence qu’ici le son est absent de la séquence projetée et qu’il s’agit de le restituer dans une parfaite synchronisation avec l’image. On suit donc avec une certaine gourmandise les gestes et déplacements de ces interprètes qui produisent de la sorte des danses à l’unisson.

Dans une seconde partie, des inserts de phrases sur le silence sont projetés (où l’on pourra entendre un silence chez Godard) et les sons produits sont retravaillés et transformés en direct par Danis Chatzivasilakis présent au plateau. Après une longue séquence de claquettes (en synchro avec une séquences de claquettes de Fred Astaire), les micros reprennent et amplifient les battements cardiaques des interprètes. Ils constituent alors une nouvelle matière sonore qui envahit l’espace sur des images de cavalcade de cheveaux. Enfin toute la séquence filmée est rembobinée à l’envers;

Coconut Effect détourne le but premier du bruitage. De la sorte, notre attention se porte autrement sur les gestes, sur le son et sur les images. Un ballet incongru se met en place. On s’amuse alors de l’ironie de certaines situations, de l’émergence de sortes de boucles rétroactives entre les différents matériaux ce qui laisse entrevoir de belles possibilités.

Concept, chorégraphie et vidéo Ioanna Paraskevopoulou. Interprété par un groupe d’étudiants du Conservatoire à Rayonnement régional de Paris.

Coconut Effect de Ioanna Paraskevopoulou vu le 7 septembre 2023 aux Abbesses et le 8 octobre au Théâtre de la Ville dans le cadre de la réouverture du Théâtre de la Ville..
On pourra retrouver Ioanna Paraskevopoulou dans le format duo MOS à la Ménagerie de Verre aux Inaccoutumés le 30 novembre 2023

On peut retrouver le programme complet Focus jeunes Créateurs par ici.