Forever de la chorégraphe Tabea Martin fait l’ouverture du festival faits d’hiver avec une version chorégraphique de ‘meurs et ressuscite’.
Qui n’a jamais joué enfant à faire le mort ? Forever de Tabea Martin, c’est un peu cela : mourir en permanence voire à répétition, quand on le décide et comme on le souhaite, pour se relever aussi vite. Car jouer à faire le mort, c’est aussi affirmer son refus d’en finir, affirmer avec encore plus de puissance un désir d’immortalité dès lors qu’il est loisir de recommencer.
C’est le sens de ce Forever, titre de la pièce, qu’on peut entendre comme : « vivant pour toujours ». C’est ce que suggèrent les cinq personnages qui, au bord du plateau, attendent l’entrée du public sur une mélodie de boîte à musique. Tout d’abord silencieux, le regard scrutateur, ils portent un sourire narquois et amusé aux lèvres. Puis se lancent dans un plaidoyer dans lequel ils affirment qu’ils seront toujours là même dans des centaines d’années alors que nous, pauvres spectateurs, serons bien morts depuis fort longtemps. « Nous sommes ici et nous resterons ici, pour toujours » lancent-ils à la volée.
Forever de Tabea Martin : jouer sa plus belle mort.
Tabea Martin, chorégraphe suisse, signe ici le troisième volet d’une trilogie qui traite de l’expérience face à notre sentiment de finitude. C’est à partir d’un matériau collecté auprès d’enfants de 8 à 12 ans que s’est inventée la pièce Forever.
Sur une scène de théâtre où l’illusion est reine, sur laquelle tout peut se dire et se faire, les cinq interprètes renouent de concert avec le pouvoir de l’enfance et questionnent notre rapport à la mort sous la forme d’un grand jeu. Dans un univers blanc comme un paradis virginal peuplé de ballons, ils jouent à décider de leur propre mort, à la mettre en scène, sur une musique baroque, au regard de chacun avec une certaine délectation dans le plaisir de la chute.
Ils y ajoutent du (faux) sang et de (fausses) larmes pour donner plus de véracité à l’illusion. Ils jouent aux mort-vivants en marche vers le public et organisent, avec quelques spectateurs, un rituel d’enterrement. C’est à qui jouera sa plus belle mort (tomber d’une falaise, mordu par un serpent, etc.) mais aussi sa résurrection.
Plus la pièce avance et plus les cinq interprètes/danseurs sont pris de frénésie. La danse vient s’insérer avec des unissons énergiques entre les différents tableaux actionnés à partir de la manipulation d’une queue de renard et d’un ballon accrochés en hauteur sur lesquels on tire pour déclencher la bande son ou son arrêt. L’effet cartoonesque n’est pas loin lorsqu’ils s’aspergent de sang ou d’eau ou que l’un d’eux disparaît totalement dans un énorme ballon gonflé d’air.
Finalement mourir n’est pas de tout repos…
Chorégraphie : Tabea Martin.
Interprétation Tamara Gvozdenovic, Benjamin Lindh Medin, Emeric Rabot, Daniel Staaf, Miguel do Vale.
Forever de Tabea Martin vu le 16/01 au Théâtre de la Cité internationale, festival Faits d’hiver.