To Life de Suzanne en cours de création au festival Open Space.
Avec son festival Open Space l’Etoile du Nord Théâtre propose en chaque début d’année un festival de danse ouvert à des artistes chorégraphiques sur le principe de plateaux partagés. Ainsi chaque soir, 3 jeunes chorégraphes et/ou compagnies présentent une étape de travail de leurs créations en cours, suivie d’un temps d’échanges avec le public. Groupe Suzanne avec To Life était de ceux-là.
Suzanne est un groupe de 4 danseu.rs.ses et performeu.rs.ses à la conception et à la réalisation de projets chorégraphiques. Depuis sa création en 2018, Suzanne a créé plusieurs pièces dont Statu et Mercure, et collaboré à différents projets artistiques, tel FAIX dernièrement, et à plusieurs vidéos.
Marcher c’est déjà danser.
Ce soir-là, Suzanne présente TO LIFE, une pièce pour 7 interprètes en cours de création. L’extrait proposé au public débute par une longue série de marches de jardin à cour, sur un fond de scène sombre, marches lentes, précises et silencieuses se répétant en boucle. Ce dispositif fait penser aux expérimentations d’Étienne-Jules Marey qui, pour l’étude du mouvement, réalisait grâce à un système de prises de vues photographiques tout à fait innovant à la fin du XIXème siècle des chronophotographies de sujets en déplacement. Mais ici nulle étude du mouvement.
L’atmosphère sur scène est sombre et pesante. Tout concourt à une certaine gravité : la lumière, la bande son, les visages neutres, les regards fixant le sol. Peu à peu, et toujours dans ce même mouvement de jardin à cour, les marches se ‘superposent’ les unes aux autres dans la profondeur de la scène, à différentes vitesses, donnant de l’épaisseur au dispositif et faisant ainsi apparaître comme une foule, un groupe d’humains toujours conduit par la nécessité de ces marches qui n’en finissent pas.
Marcher pour résister.
On ne sait s’il s’agit de fuir ou d’aller de l’avant et peut-être s’agit-il de la même chose. Des gestes apparaissent presque imperceptiblement. Ici un bras et une main qui se tendent et semblent inviter à suivre une direction ; là d’autres mains portées à hauteur de la bouche comme pour se réchauffer à moins qu’il ne s’agisse d’étouffer un cri. Ou cet autre moment figé quelques secondes: un couple reste enlacé pendant qu’un autre les regarde. Partage-t-il un sentiment de joie ou de consolation ? Polysémie des gestes et des attitudes.
En l’espace d’une vingtaine de minutes, par touches successives, les contours d’un monde futur, voire peut-être même post-apocalyptique, se dessinent. Une humanité marche vers son destin dont on ne sait encore, à ce stade de la création, ce qu’il en adviendra. Suzanne fait de la marche la métaphore d’un acte de résistance au sein de laquelle semblent pouvoir se reconstituer des formes de solidarités. Ce qui n’est pas sans faire écho a ce message épelé en toute lettre dans Mercure, une précédente création : « R-E-N-C-O-N-T-R-O-N-S-N-O-U-S ».
La création est attendue pour 2024.
Chorégraphes : Lorenz Jack Chaillat-Cavaillé, Julien Chaudet, Julien Deransy & Eurydice Gougeon-Marine. Interprètes : Lorenz Jack Chaillat-Cavaillé, Julien Chaudet, Julien Deransy, Eurydice Gougeon-Marine, Mélina Ferné, Anne Quaderi & Eva Studzinski.
Etape de travail vue à l’Etoile du Nord Théâtre le 14/01/2023, au festival Open Space, les Plateaux partagés avec Julien Rossin et Nana Movement.
Voir notre article / portfolio sur la création en cours de To Life.
Site de groupe Suzanne
crédit photo To Life, Suzanne © filipf.o.t.o / avoiretadanser