Leïla Ka se fait la belle en sortie de résidence.
Le 104 présentait un extrait de la prochaine création de Leïla Ka, Se faire la Belle, dont elle donnera la première au Théâtre de l’Étoile du Nord en mars 2022.
Pode ser, 2017.
Nous nous souvenons fort bien des premières fois où nous avons vu Leïla K dans son tout premier solo Pode ser. C’était en 2017 dans le cadre des Rencontres chorégraphiques de Mouvement contemporain, puis à l’occasion de Dansorama, salle Olympe de Gouges dans le XIème arrondissement. Nous apprenions alors qu’elle venait du hip-hop et avait été interprète dans May B., pièce iconique de Maguy Marin, ce qui lui conférait d’emblée, il faut bien le dire, une certaine aura.
Pode ser est une danse qui nous avait étonnés par cette manière de garder les bras repliés, mains arrimées au haut du col, faisant de cette contrainte la possibilité d’une danse tout à fait singulière, vive et impétueuse. Il y avait aussi cette dualité de la tenue que l’on percevait peu à peu. Sous la robe à volant descendant jusqu’au pied se dévoilaient les baskets et le bas de survêtement, cette double tenue venant elle-même redoubler la tension entre la fluidité du mouvement et la contrainte imposée au corps. Ce qui autrement dit laissait entendre que ce que nous voyions n’était pas – toute – la seule réalité. Aussi faisait jour une interprétation particulière de la danse de Pode ser comme questionnement sur l’état mouvant de l’identité et les possibilités d’échapper aux lieux d’assignation. D’ailleurs, traduit du portugais ‘pode ser’ signifie : ‘il se peut, ce pourrait être’. Derrière ce ‘il se peut’ il y a toute l’ambiguïté d’une possibilité qui n’est en rien assurée.
Depuis sa création, ce premier solo a obtenu une belle reconnaissance en France comme à l’étranger recevant plusieurs récompenses. Par la suite, Leïla Ka a ajouté à ce premier solo le duo C’est toi qu’on adore.
Se faire la belle, 2021.
La dernière création Se faire la belle devrait clore cette trilogie de formes courtes. A nouveau seule en scène, la danseuse porte une longue chemise/tunique blanche. La lumière l’isole totalement du reste du plateau et vient sculpter le corps et le drapé du tissu en mouvement. Cheveux courts, regard assuré dans cet habit minimaliste, elle a ainsi l’air d’une Jeanne d’Arc moderne prête à en découdre. Les pieds bien ancrés au sol, ses mains enserrent le devant de son habit. Le haut du corps est le lieu de mouvements et de gestes vifs, ‘segmentés’ après quoi d’autres recherchent l’ampleur et la torsion. De façon tout à fait inattendue, l’image de la danse de Loïe Fuller imprima fugacement notre rétine lorsque les bras en extension laissèrent passer la lumière à travers la transparence du tissu.
La danse de Leïla Ka poursuit là encore ce questionnement sur l’identité en se défaisant de mues successives afin d’accéder à une métamorphose, comme la chrysalide devenant papillon. Une manière de se faire la belle en somme et d’affirmer avec détermination son désir de quitter l’endroit qui lui est assigné pour aller voir ailleurs, selon son bon plaisir.
Lire notre article sur Bouffées et C’est toi qu’on adore.
Site de Leïla Ka