En 2007, Xavier Leroy avait entrepris de s’attaquer à ce monument de la musique et de la danse que constitue le Sacre du printemps de Stravinsky. Rappelons que le Sacre fut chorégraphié pour les Ballets russes par Nijinski en 1913 au Théâtre des Champs-Elysées. Depuis nombreux sont les chorégraphes qui en donnèrent leur propre version.
Après avoir découvert le film d’une répétition publique joué par l’orchestre philharmonique de Berlin sous la direction de Sir Simon Rattle, Leroy voit dans cette direction d’orchestre les possibilités d’une chorégraphie et décide de travailler sur une performance où il occupera la position de “chef d’orchestre” devant des spectateurs installés comme s’ils étaient les musiciens de l’orchestre.
Pour cette version donnée au Centre Pompidou, la modalité de diffusion sonore dans la salle au niveau des sièges des spectateurs respecte la spatialisation des instruments tels qu’ils sont répartis dans l’orchestre. Le spectateur occupe donc la place du musicien auquel s’adresse le chef d’orchestre/danseur lorsque celui-ci dirige la partition.
A la différence du solo initial de 2007 il y a maintenant trois danseurs/chefs d’orchestre qui se succèdent pour diriger Le Sacre : les gestes sont précis même s’ils engagent ici la totalité du corps. Et il faut bien avouer que c’est cet engagement qui est fascinant, comme d’observer les différentes qualités de corps et de mouvements traversées par les différents interprètes. Cette performance modifie l’expérience, et dans le regard et dans l’écoute, que nous, spectateurs faisons alors de cette partition.
Le final est un beau moment de bravoure où les 3 interprètes côte à côte cette fois-ci, ‘lâchant’ leurs gestes, cherchant moins la précision que l’énergie, se lancent dans une espèce de battle assez jubilatoire où chacun prend alors au vol la direction du Sacre là où l’autre l’abandonne avant de terminer ensemble dans un dernier geste commun.
Le Sacre du Printemps de Xavier Leroy vu le 23/11/2019 au Centre Pompidou avec le festival d’automne.