Les Vagues, dernière création de Noé Soulier, poursuit le sillon qu’il creuse depuis ces précédentes pièces sur la question du geste et sa décontextualisation. Ici et encore plus qu’avant, à partir d’indications motrices telles que lancer, éviter, frapper, etc., mais en en retirant toute finalité, le geste devient un pur geste chorégraphique et ne se référence plus que de lui-même, sans but pratique, en gardant toute son énergie, sa trace kinesthésique pour ainsi dire et sa capacité à activer en retour la mémoire des expériences propres du spectateur.
Sur scène, 6 interprètes sautent, esquivent, propulsent des parties de leur corps, tombent et roulent au sol ensemble ou séparément, et expérimentent avec un réel engagement physique de multiples formes d’agencement et d’interaction à partir des quelques indications motrices évoquées plus haut. Accompagnés de 2 percussionnistes de l’ensemble Ictus, les danseurs occupent un plateau dépouillé de tout artifice hormis les instruments placés sur le côté. Les sons des percussions donnent à la pièce une certaine sensualité.
L’écriture de la partition à laquelle a participé le chorégraphe suit le même processus que la chorégraphie : une structure commune qui permet aussi l’improvisation. « Nous chorégraphions la musique comme nous composons la danse ». On pense un peu à Anne Teresa de Keersmaeker dont on connaît par ailleurs la grande proximité avec l’ensemble Ictus. Et le tableau final est particulièrement réussi qui voit s’interrompre les musiciens alors que les danseurs parcourent encore le plateau, variant les agencements et les figures, avec une énergie débordante.
Les Vagues de Noé Soulier, vu à Chaillot en décembre 2018.
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