Dançando com a Diferença, une compagnie de danse inclusive.
Dançando com a Diferença est une compagnie de danse inclusive de la région de Madère née en 2001. Depuis, la compagnie placée sous la direction artistique d’Henrique Amoedo est devenue professionnelle, avec pour objectif de réunir sur scène des personnes avec et sans handicap. Cette année pour le festival d’Automne, la compagnie présentait pas moins de 3 pièces commandées auprès de chorégraphes de renom : Ôss de Marlène Monteiro Freitas dansée à Chaillot, Blasons de François Chaignaud et Doesdicon de Tânia Carvalho au Théâtre de la ville / Les Abbesses. Autant nous étions sortis déçus de la pièce de Marlene Monteiro Freitas, autant la magie s’est opérée pour la double proposition du Théâtre de la Ville, et plus particulièrement pour Blasons de Chaignaud, une pièce tout en délicatesse.
Avec Ôss présenté au Théâtre de Chaillot Marlene Monteiro Freitas, qui entendait révéler le solide comme le mou du corps humain, passait à côté de la chair de ses interprètes. Et la succession des saynètes ne suffisait pas à retrouver la folie de la chorégraphe.
Blasons de François Chaignaud.
Pour le double programme du Théâtre de la Ville, c’est Blasons qui ouvrait le bal. A l’entrée du public en salle, deux interprètes sont déjà au plateau. Ils regardent avec assurance et une grande attention les spectateurs qui s’installent. Ils se chuchotent quelques mots à l’oreille avant de disparaître derrière un grand paravent doré qui sépare la scène sur toute sa largeur. Par un ingénieux système de portes dérobées d’autres les remplacent tout autant scrutateurs du public. Elles et ils sont vêtus d’habits noirs qu’on imagine sortis d’un 17ᵉ siècle espagnol, mâtinés de kimono japonais et de vestes plus contemporaines. Ainsi commence Blasons comme un ballet d’apparitions et de disparitions, de regards appuyés dans notre direction et de mots chuchotés à l’oreille, puis de petits carnets sortis des poches et sur lesquels les uns et les autres prennent des notes. Mais que tirent-ils de leurs observations, que notent-ils dans ces carnets ? L’intelligence de Blasons, qui rappelons-le définit l’identité d’une personne par des signes distinctifs extérieurs, est de mettre l’altérité du côté des spectateurs, de “retourner le gant”, d’inverser le regard et cela marche merveilleusement bien.
Doesdicon de Tânia Carvalho.
Doesdicon de Tânia Carvalho s’enchaine sans temps mort sur un univers de poupées qui auraient pris vie. Les visages sont maquillés de manière outrancière et les costumes renvoient à un imaginaire lié au Moyen Âge avec collerettes et collants. La première scène est de toute beauté : l’une des interprètes, dont le handicap l’empêche de tenir debout, entre en roulant sur elle-même jusqu’au centre du plateau puis, agenouillée, entame une chanson. Le corps traversé de dyskinésies, l’interprétation qu’elle donne est d’une justesse des plus émouvantes. Les tableaux s’enchainent ensuite à la façon de danses d’automates déréglés. Même si certaines longueurs ne sont pas absentes, Doesdicon est aussi une belle réussite.
Spectacle vu le 15/10/2022 au Théâtre de la Ville.
Blasons de François Chaignaud, avec Bárbara Matos, Bernardo Graça, Joana Caetano, Mariana Tembe, Milton Branco, Sara Rebolo, Sofia Marote, Telmo Ferreira.
Doesdicon de Tânia Carvalho avec Bernardo Graça, Diogo Freitas, Isabel Teixeira, Joana Caetano, Maria João Pereira, Luís Guerra, Sara Rebolo, Telmo Ferreira.
Visuel : Doesdicon, Tânia Carvalho © Júlio Silva Castro